vendredi 25 janvier 2008

‘’ Taxi !’’

Dans les villes du vingtième siècle dont les habitants sont soumis à des contraintes souvent mal tolérées, le chauffeur de taxi fait figure d’homme libre. En effet, même s’il est employé par une compagnie, il ne travaille pas sous la surveillance d’un contremaître ou d’un patron. Il peut aménager son lieu de travail, où il peut lire le journal, rêver ou dormir.

D’autre part, il a l’impression d’avoir des droits sur la rue es sur la ville : ne lui réserve-t-on pas des points de stationnement ? N’est-il pas un des rares habitants à connaître les plus petites impasses, à localiser une nouvelle rue ? Avec quelle infaillible mémoire il choisit un itinéraire, empruntant les voies à sens unique ou les artères à circulation fluide ! il y manœuvre avec aisance, et sa dextérité est reconnue par les autres automobilistes.

Sa mobilité assure également sa liberté, car, en un sens, il demeure un nomade dans l’espace réservé aux sédentaires. Il ne sait pas, chose vraiment étonnante, où il se trouvera à l’instant suivant, lorsqu’il liera pour quelques moments son destin à celui d’un ou de plusieurs inconnus.

De ce fait, le chauffeur de taxi risque l’aventure. En maraudant à une heure tardive, en transportant des clients louches, il est exposé à des agressions : il est d’ailleurs devenu un personnage de films policiers. En fin, le chauffeur recueille toutes sortes de secrets, les uns innocents, les autres coupables ; isolé du monde dans cet abri ambulant, derrière un être anonyme dont il ne voit que le dos, un client peut en effet laisser échapper des mots, des souvenirs… C’est que, dans un taxi, une confidence ne porte pas à conséquence.

Ainsi, le chauffeur de taxi n’apparaît pas comme un banal transporteur. C’est une des figures les plus fascinantes de notre époque. Il est indissolublement lié à la ville, dont il assume les secrets et les conflits.

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